Sophia Aram : l’interview

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3733

12845Décapante sur scène, l’humoriste adopte un ton plus sérieux, pour parler de son grand garçon de treize ans, mais aussi pour raconter sa vie et son enfance.

“Une vraie mère juive”

Côté Famille : Que pensez-vous de la famille en général ?

Sophia Aram: Je ne pense rien du concept de la famille en général. Je crois que le modèle français traditionnel n’existe plus vraiment. Chacun la construit à sa façon, avec ou sans enfant, les siens ou ceux des autres, un homme et une femme, deux hommes, deux femmes, on s’en moque. C’est l’amour qui fait tout. Ce ne sont pas les liens du sang qui comptent. Mon fils a un grand frère qui vit à mi-temps à la maison. Ils s’adorent.

CF : Quel genre de maman êtes-vous ?

SA : Une maman méditerranéenne, le cliché parfait de la mère juive. Je suis très protectrice, je couve mon fils de manière presque animale et j’assume. Et aujourd’hui, ce n’est pas toujours bien vu. Pour faire bien, nombreuses sont celles qui jouent être de mauvaises mères. Mais moi, j’adore la relation que j’ai avec lui. Pourtant je l’ai eu relativement jeune (26 ans), un âge où on est sensé être légère. Contrairement à la plupart de mes amies qui ont été mère après 35 ans, soit dix ans après moi.

Avoir un enfant ce n’est ni une obligation, ni une fin en soi. Etre mère, c’est compliqué, c’est un vrai bouleversement. Au delà de l’amour et de la joie que procure son arrivée, cela entraîne aussi des angoisses de mort très dures à gérer.

CF : Comment élevez-vous votre fils ?

Nous sommes beaucoup dans le dialogue et dans la confiance, mais pas copains pour autant. On parle de tout, il me raconte plein de choses, et il a le droit d’avoir aussi ses petits secrets. Je suis assez stricte sur certaines règles qui balisent le terrain et sont aussi faites pour être transgressées. Pas de tv ni d’ordi dans la chambre, par exemple, et des jeux vidéo uniquement en dehors des jours d’école. Quand il sort, j’exige de savoir où il va et avec qui il est. Il m’arrive bien sûr de me mettre en colère, un peu moins maintenant. Mais quand je me fâche, j’attends que la tension tombe et j’explique ensuite pourquoi.

On passe beaucoup de temps ensemble. Le petit-déjeuner est un des moments privilégiés de la journée. On en profite pour parler tous les trois d’un tas de choses, on est tous super bavards, ça ne s’arrête jamais. Pour les déjeuners, on essaie aussi de se retrouver. Mon fils ne mange plus à la cantine. Et si j’ai des déjeuners, je les cale après. Quand on se quitte, il retourne en classe et moi je file à mon rendez-vous.

Eduquer, pas qu’une affaire de principes…

CF : Avez-vous des principes moraux, d’éducation ?

SA : Au début, j’ai lu tous les bouquins des pédiatres, pédopsychiatres, psychanalystes qui existaient dans les rayons. J’avais très peur de mal faire. Et puis j’ai tout jeté. Car il n’y a pas de principes définis. C’est à nous d’avancer seuls. Et quand on fait des erreurs, ce ne sont pas celles que l’on enseigne dans les livres. Ce sont les nôtres.

A la maison, par exemple, on est assez cool à table. En revanche, au restau, chez les amis ou dans la famille, je lui ai appris à savoir se tenir et à respecter les coutumes de chacun. Il maîtrise les baguettes, il sait manger avec les trois doigts de la main droite dans le plat, comme au Maroc et ne s’avise pas de poser les coudes sur la table quand il est chez sa grand-mère paternelle. Mais je ne l’ai jamais obligé à finir son assiette.

En revanche, j’ai toujours été intransigeante sur les temps de sommeil et jusqu’à l’âge de trois, quatre ans la sieste était de mise.

CF : Pensez-vous que l’on en fait trop pour nos enfants en général ?

On en a moins et on les a de plus en plus tard, on les considère comme le centre du monde, la société change… Mais je crois que chacun tente de doser comme il peut. Le but étant d’aider nos enfants à être libres.

CF : Vous révoltez-vous contre le phénomène de l’enfant roi ?

SA: C’est une génération qui arrive à l’âge adulte. On va bien voir ce que cela donne. En général, je vois trop de parents qui, pensant bien faire, ne décident pas pour leurs enfants et leur laissent trop souvent le choix, dans ce qu’ils veulent faire, ou manger par exemple. Mais c’est déstabilisant et angoissant pour eux, car cela leur donne l’impression que les adultes ne maîtrisent pas. Je ne juge pas, je considère que mon fils est exceptionnel et je pense que chaque parent est en droit de penser que le sien l’est aussi…

Eduquer : transmettre ou corriger?

CF: Avez-vous reproduit les mêmes « bêtises » que vos parents ?

SA: J’essaie d’être la mère que j’aurais aimé avoir… Je suis la quatrième d’une famille de six enfants. On était en autogestion. Forcément je n’élève pas mon fils unique de la même façon. Je construis un nouveau modèle !

CF :Quelle enfance avez-vous eue ?

Une enfance plutôt sympa, dans une fratrie assez « chtarbée ». Quand les parents dormaient, avec mes frères et sœurs, on faisait des booms clandestines la nuit, dans la cuisine, avec du thé à la menthe. On aime d’ailleurs toujours danser et faire la fête et toutes les occasions sont bonnes pour se réunir et regarder nos enfants grandir ensemble. On formait un vrai clan. On reproduisait les séries américaines vues à la télévision, comme « Drôles de Dames ». Mes deux grandes sœurs prenaient les beaux rôles et moi j’étais la plus moche des trois. Avec mon frère j’apprenais à grimper au mur comme Spiderman. Une année sur deux on partait l’été au Maroc. Quand on restait on organisait avec les petits voisins des pique-niques à la base de loisirs de Saint-Quentin-en-Yvelines. Au programme : roller, vélo, ballon, foot, c’était vraiment sympa.

CF : Que souhaitez-vous transmettre à votre enfant ?

SA : Même si cela me fend à chaque fois le cœur de m’en séparer, je veux l’aider à être autonome, libre de prendre son envol et suffisamment armé dans la vie pour être bien dans sa peau et dans ses baskets. Je n’aimerai pas qu’à trente ans il soit encore à la maison.

CF : Y a-t-il des choses que vous ne feriez plus ou, au contraire, que feriez-vous avec le recul ?

SA: Non pas vraiment. Globalement tout va bien. Si aujourd’hui mon fils était différent, je me poserai peut-être des questions. Et puis même si j’ai commis des erreurs, ce n’est pas grave, c’est aussi comme cela que l’on apprend. Il a bientôt 13 ans et c’est un garçon super agréable, drôle et sympa. Je me dis qu’avec son père on s’est pas trop mal débrouillés.

CF : Les enfants, en général, ont-ils évolués par rapport à maintenant?

SA : Forcément, quand je regarde mon fils qui grandit dans un autre environnement, avec entre autre l’arrivée des nouvelles technologies et Internet qui est un outil d’ouverture formidable sur le monde, je me dis que nos enfants sont bien plus nourris culturellement. Nous, nous avions un poste de télévision avec trois chaînes seulement, parfois la médiathèque. C’était quand même plus limité.

CF : Qu’est-ce qui vous révolte aujourd’hui ?

SA : Tous les enfants ne partent pas avec les mêmes chances dans la vie. Et cette inégalité me révolte. Pourtant l’école devrait être là pour permettre à tous de se rencontrer, de se mélanger, d’échanger et apprendre à vivre ensemble. La pression scolaire aussi m’insupporte. Dès la maternelle, on a l’impression que les parents les préparent au bac, voire aux grandes écoles. Ils veulent déjà leur faire sauter des classes, les chargent d’activités et ne les laissent plus s’ennuyer. Et pourtant l’ennui c’est ce qui permet aux enfants de développer leur imagination.


CF : Quel est le rôle des grands-parents ?

SA: Ils n’ont aucune contrainte, aucun devoir. Je ne leur demande rien et c’est à eux de construire une relation avec leurs petits-enfants. Tout doit rester de l’ordre du plaisir.

Toute l’actualité de Sophia Aram sur : www.sohia-aram.com

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