Quand on parle de grand-parents, l’image qui nous vient souvent en tête est la mamie ridée et souriante, vétue de son plus beau tablier, un rouleau à patisserie à la main et le papy moustachu qui s’occupe de son jardin… Pourtant il suffit de regarder autour de nous pour constater que cette image ne colle pas du tout à la réalité: les grand-parents d’aujourd’hui, les « nouveaux grand-parents », sont jeunes, dynamiques et généralement encore actifs si bien que l’acceptation de cette nouvelle identité peut s’avérer difficile.
La psychologue clinicienne et thérapeute familiale Anne-Solenn Le Bihan s’est attaquée à ce sujet et propose son regard sur le rôle des grand-parents d’aujourd’hui dans le livre Si tu dis NON, je vais chez Mamie!
Dans cette étude, Anne-Solenn Le Bihan parle de la difficulté de devenir grand-parent. En effet, devenir grand parent peut ne pas être facile puisque cela place l’individu face à son état vieillessant, ce qui peut bouleverser consciemment ou inconsciemment le nouveau grand-parent et être une source d’angoisse.
Elle dresse ensuite le portrait des nouveaux grands-parents.
Et enfin, le docteur Le Bihan analyse les différents rapports entre les grand-parents et leurs enfants et petits-enfants.
Le nouveau rôle des grands-parents? Rencontre avec l’auteure
A qui destiniez vous ce livre lorsque vous l’écriviez?
Si tu dis NON, je vais chez Mamie est d’abord destiné aux parents qui font devenir leurs propres parents grand-parents et aux personnes qui deviennent grand-parents car ce n’est pas une étape facile: c’est une nouvelle identité à accepter. Ce livre est donc écrit pour les éclairer sur ce qui se passe à l’intérieur d’eux même et sur leur nouvelle situation.
Qui sont les nouveaux grands parents ?
Aujourd’hui, les grands parents n’ont plus le même visage: il en est finit de la « mamie confiture » et du « papy moustache », cette image d’épinale n’est plus valable mais reste dans les esprits. C’est difficile pour les nouveaux grands parents qui ont du mal à se référer à cette image qui ne leur correspond pas. Aujourd’hui les nouveaux grand-parents sont plus jeunes, en bonne santé, avec un bon pouvoir d’achat, ils sont généralement encore actifs (ce qui était peu le cas auparavant) puisque les grand-parents ont autour de la cinquantaine aujourd’hui. Ils sont alors à l’apogée de leur vie économique, sociale et professionnelle et pourtant on leur annonce qu’ils vont être grand-parents. Toutefois, leur rôle n’est pas vraiment différent, si ce n’est le fait qu’on ne leur confie plus une partie de l’éducation comme c’était souvent le cas avant. Aujourd’hui, ils ont davantage une fonction d’accompagnateur, de tuteur, une image d’adulte bienveillant et aimant auprès de leur petit enfant.
La difficulté à accepter ce nouveau statut est donc lié au manque d’image de référence?
Oui c’est une des difficulté, car tout est à inventer et c’est aussi le choc pour des personnes qui se voient jeunes, actives, de devenir grand parent. C’est toujours un évènement qui les prend par surprise même si ils s’y attendaient, il y a toujours une surprise car ce ne sont pas eux qui décident, qui contrôlent ce changement de statut. Les enfants imposent à leur parents une nouvelle identité qui est celle de grand parent. La question est alors souvent « Comment vais-je continuer ma vie active tout en étant grand parent? » et ils se disent qu’ils ne sont pas prêts pour rôle de papy moustache imposé par la société. L’image du nouveau grand parent est donc à créer, à inventer pour qu’ils puissent s’y identifier.
Les nouveaux grand-parents sont jeunes, pourtant il y a une hausse importante des maternités tardives donc est ce que ce phénomène de nouveaux grands parents jeunes ne sera pas finalement assez court? Et laisseront-ils la place à des grand-parents très vieux?
Effectivement, aujourd’hui les nouveaux grands parents sont jeunes parce qu’ils ont fait des enfants tôt. Pour les générations futures, on va assister à une grand-parentalité plus agée, il est peu probable que l’age du 1er enfant recule. Grands parents le seront de plus en plus tard. Mais ça ne changera pas grand chose car on est « vieux » de plus en plus tard: les retraités sont de plus en plus actifs (loisirs, etc) donc combiner cela avec une activité de grand parents sera toujours un problème.
Dans votre livre, vous dites que le rôle du grand-parent est indispensable pour la construction psychique de l’enfant, comment ça se passe pour les enfants qui n’en ont pas ?
Très souvent, les petits orphelins de grand-parents cherchent ailleurs une image tutellaire, chez d’autres personnes agées: un oncle, un cousin, une grande tante, mais aussi hors de la famille: un prof ou plus tard un patron: quelqu’un qui représente une autorité sage et qui a de l’expérience. Les enfants cherchent ailleurs et heureusement sinon ces enfants partiraient avec un grand handicap.
Quel est ce handicap?
Sans grand-parents, la transmission familiale ne s’effectue pas, or elle est très importante: « Comment était Papa quand il était petit? », « Comment la famille s’est débrouillé durant la guerre? » La transmission des ces petites histoires familiales est très importante car cela aide les enfants à se situer dans son histoire familiale, il sait ainsi qu’il y a eu un avant lui, un pendant lui et qu’il y aura un après lui, il se situe alors dans la filiation. Ce n’est jamais mieux fait que par les grands parents.
Un livre transgénération
Ce livre est destiné tout autant aux grands-parents qu’aux parents. Les grand-parents comprendront mieux la relation qui les lie à leurs petits enfants, mais pas seulement: tout le monde en apprend sur la relation qu’il a ou avait avec ses grands-parents. Dépourvu du jargon qui fait parfois le défaut des psychologues, ce livre se lit très facilement et donne envie d’appeler sa mamie sitôt la dernière page tournée!
