Véronique Jannot « Il n’y a rien de plus magnifique qu’un rire d’enfant »

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Une de ses passions: les enfants. Car même si elle n’a pu en avoir, jour après jour, la comédienne et chanteuse se bat comme une lionne pour tous ceux qui ne sont pas nés sous une bonne étoile.

 

• Que pensez-vous de la famille en général ?

Il y a la famille de sang, celle dont on hérite qui est un repère important. Et puis, il y a celle de cœur, les proches, les amis, avec laquelle on évolue et on construit sa vie. Avec la première, on se voit peu, excepté maman. Nous vivons dans deux mondes très différents. Mon frère habite en province. Et moi je navigue entre le sud de la France et Paris. La vie nous a malheureusement éloignés.

 

• Quelle enfance avez-vous eue ?

Une enfance que je souhaite à tout le monde. J’ai été désirée et aimée avec un grand A. Nous habitions Annecy, une ville de province au milieu des montagnes. Un milieu source d’équilibre et de beauté. Enfant, je me baladais dans la campagne avec mon grand frère. Très tôt, j’ai pu pratiquer de nombreux sports. Quand à 15 ans, j’ai choisi d’être comédienne, mes parents m’ont dit : « Quelle que soit ta décision, nous serons à tes côtés». Une belle preuve de tolérance, d’amour et de compréhension. Papa nous a quittés il y a deux ans mais j’ai toujours maman. La mort d’un parent et un événement terrible, inéluctable certes, mais extrêmement dur. Quand ils partent, les derniers remparts s’effondrent.

 

• Vous n’avez, malheureusement, pas pu avoir d’enfant…

Quand à 22 ans, le verdict est tombé, cela a été le drame de ma vie. Depuis l’âge de 16 ans je désirais un enfant. Et pourtant, ce sont souvent les plus grandes souffrances qui, lorsque l’on sait les dépasser, permettent de nous faire avancer à pas de géant.

 

• Le monde de l’enfance vous interpelle puisque vous êtes engagée dans de nombreuses associations qui leur viennent en aide.

Je les adore. Ils sont pleins d’espoir, ils sont l’avenir. Ils sont neufs, insouciants, spontanés, enthousiastes, sans tous les filtres comportementaux que nous avons développés nous, adultes. C’est une terre toute neuve. C’est pour cela aussi qu’il faut faire attention aux empreintes que l’on laisse… Et puis il n’y a rien de plus magnifique qu’un rire d’enfant. Le fait de ne pas en avoir eu m’a peut-être rendue plus disponible pour les autres. C’est tellement dur d’élever des enfants. J’ai bien ma petite puce, que je parraine, depuis six ans, au sein de l’association Graines d’Avenir* que j’ai créé en 2005. Mais elle est élevée en Inde dans un village d’enfants tibétains de Dharamsala. Quand elle viendra en France ce sera déjà une petite femme.

 

• Mais vous n’arrêtez donc jamais, puisqu’il y a aussi « Rêves de gosse » et l’opération Volvic-Unicef…

Il me tient à cœur de les aider. C’est ma façon aussi de bien utiliser « ma précieuse vie humaine », comme le dit le Dalaï- Lama. Avec Graine d’Avenir nous venons en aide aux enfants du Tibet en exil. Loin de leur famille, accueillis en Inde ou au Népal, dans des villages d’enfants, ils sont dans une pauvreté extrême. Avec Rêves de Gosses* dont je suis la marraine, et surtout grâce aux pilotes qui participent, des enfants handicapés font leur baptême de l’air. L’émotion est à chaque fois au rendez-vous, tellement forte, tellement intense. Affronter le handicap n’est pourtant pas facile. On en fait trop ou pas assez, alors qu’il suffit d’être normal. Quant à l’opération Volvic-Unicef, un parrainage ponctuel qui n’a plus besoin de moi maintenant, elle finance le forage de puits au Niger pour que l’eau soit enfin accessible à tous dans un pays qui souffre de la sécheresse, permettant aussi de soulager la tâche des femmes et des jeunes filles et du même coup d’agir pour la scolarisation en primaire.

 

• Mais dans nos contrées, pensez-vous que l’on en fait trop pour nos enfants en général ?

Oui je trouve. Quand je rentre d’Inde ou d’Afrique, le contraste est si flagrant qu’il est parfois dur à supporter. Sous prétexte que l’on ne veut pas qu’ils manquent de quoi que ce soit, on les gâte parfois à outrance, on les sur protège. Les parents ne sont pas là pour garder les bébés au nid, mais pour les préparer à prendre leur envol du mieux possible. De leur part, c’est aussi parfois une façon de compenser. Parce qu’ils ont trop de choses à gérer et pas assez de temps à leur consacrer. Je ne suis pas sûre que ce soit la meilleure des solutions. Ce n’est pas parce qu’on a les moyens qu’il faut trop leur en donner. L’argent ne fait pas tout. Certains parents avec peu, savent parfaitement rendre leurs enfants heureux. Car ce dont ils ont besoin avant tout c’est d’être avec ceux qu’ils aiment et qui les aiment.

 

• Vous révoltez-vous contre le phénomène de l’enfant roi ?

Ce sont des enfants dont on affaiblit en quelque sorte le système immunitaire. Ils ne connaissent pas l’interdit et n’ont jamais appris le sens de l’effort et du mérite, ni comment gérer les difficultés. Tout leur est apporté sur un plateau. Et ce n’est pas leur rendre service, car la vie ne leur fera pas de cadeaux d’une manière ou d’une autre. L’autorité est à mon sens indispensable. Une autorité juste et intelligente. Un enfant a besoin de barrières. Ne serait-ce que pour savoir quand il les dépasse.

 

• Les enfants, en général, ont-ils évolués par rapport à maintenant ?

Question électronique, ils sont imbattables. Dans la vie de tous les jours, ils sont plus ouverts, plus débrouillards, plus intelligents dans une certaine mesure. Mais ce monde de consoles, d’ordinateurs, ce n’est pas sain. Il est important qu’ils aient des jeux d’enfants. Il y a un temps pour tout !

 

• Qu’est-ce qui vous révolte aujourd’hui ?

Le nombre de femmes maltraitées dans le monde, qui n’existent qu’en tant que mères reproductrices. L’univers politique aussi me révolte. Je ne crois pas en leur sincérité. Je pense que le pouvoir c’est un Alien qui rentre dans les tripes et rend fou. N’est pas Nelson Mandela ou Dalaï-Lama qui veut.

 

• Quel est le rôle des grands-parents ?

C’est super important d’avoir des souvenirs avec eux. Les grands-parents ont du temps, et comme ils ne sont pas responsables de l’éducation de leurs petits enfants ils peuvent se permettre des complicités différentes. Je partais parfois en vacances avec les miens. Et je me souviens encore des tartines que mon grand-père coupait comme des mouillettes, de ses faisselles de lait caillé dans un panier de paille ou encore des heures passées ensembles à jouer à la marchande. Je vendais à prix d’or des morceaux de saucisson en pâte à modeler. Ou de mon autre grand-père, du côté de maman, qui avait fait la guerre, dont j’étais très proche. Lorsque j’étais triste, à cause d’un garçon, il me disait : « Ma Mouquette, tu ne vas quand même pas pleurer pour un poilu ! »

 

*www.grainesdavenir.com

01 55 90 27 44

*www.revesdegosse.com

04 68 41 20 97

 

Une chanson douce

Tous les grands classiques et autres titres inédits sont réunis dans ce double album de 25 comptines interprétées par Véronique Jannot. En duo avec Natasha St Pier, Yannick Noah, Grand Corps Malade, Gérard Lenorman, Henri Savaldor, ZUT, et en solo, l’artiste, chante pour les enfants en leur murmurant des mots gais, tendres et mélodieux.

Tout doux, EMI/Play On, 17€.

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