Isabelle Filliozat : « Il est absolument important et nécessaire de parler de tout ça avec ses enfants ».

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Est-ce que l’on peut proposer à l’enfant de dessiner ce qu’il ressent par exemple ?

Oui le dessin est tout à fait aidant. On ne va pas forcément en parler de façon abrupte, on ne va pas dire à son enfant « dessine les attentats », on va simplement lui permettre encore plus que d’habitude, d’avoir des moyens d’expression manuels (dessin, pâte à modeler, sable…). Ce n’est pas tant ce qu’il va mettre sur le dessin qui est important, et surtout nous n’avons pas besoin de l’analyser. Mais il est certain que les enfants vont faire beaucoup de dessins dans lesquels il y aura des représentations de ces attentats. Cela pourra être des morts, mais aussi des pompiers, des secouristes etc. Ils vont aussi le rejouer avec leurs jouets et ils ont besoin d’extérioriser toute cette tension qu’ils ont en eux. De manière générale, lorsque l’on parle avec un enfant il est important que ses mains soient occupées à quelque chose. On ne parle pas à un enfant face à face, mais plutôt en se mettant à côté de lui. L’objectif c’est que lui en parle, parce qu’il faut faire sortir tout ce qui ne va pas dans sa tête, les peurs, les angoisses, les constructions mentales qui se sont installées.

En tant que parent, comment ne pas transmettre ses propres angoisses à ses enfants ?

Il ne faut pas forcément éviter. L’enfant le sent quand on est angoissé, donc si on évite de lui montrer il va le sentir encore plus fort. Il va penser « c’est encore plus grave que ce que je pensais puisque mes parents me le cachent. » On peut dire à son enfant que même à nous, cette situation nous fait peur. On va même généraliser pour ne pas justement trop centrer sur nous-même ou sur l’enfant. Au lieu de lui demander « est-ce que tu as peur ? » et dire « moi j’ai peur », on va plutôt dire « quand il se passe des choses comme ça, alors les humains ont peur ». Cela permet à l’enfant de se sentir inclus et qu’il n’est pas l’impression que ses parents ou lui-même sont spéciaux parce qu’ils ont peur, mais qu’il s’agit d’une réaction naturelle. Cet état d’anxiété dans lequel nous sommes tous aujourd’hui est normal. On n’a pas à le fuir, on a juste à le traverser et à le montrer.

Ce qu’il faut surtout c’est éviter de dire aux enfants qu’il y a des méchants et des gentils. On va plutôt dire « ils ont fait des choses méchantes ». Mais il ne faut pas rentrer dans une dualité avec le bien d’un côté et le mal de l’autre. Sinon c’est très complexe pour un enfant, parce que lui de temps en temps on lui dit qu’il est méchant et il ne faut pas que ce mot « méchant » soit associé aux terroristes. On peut leur expliquer ce que c’est Daesh, le conflit en Syrie, même pour des petits, pour que cela ne vienne pas de nulle part pour eux. Même des enfants petits peuvent comprendre çà et il est important de ne pas trop simplifier parce que si on dit simplement « des méchants ont fait ces attentats » cela devient terrifiant pour un enfant. Cela veut dire pour lui que n’importe quelle personne méchante risque de tuer.

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