Qui mieux qu’une mamie peut s’occuper des enfants ? Depuis quelques années, les sorties d’école ne sont plus le terrain des étudiantes occupant un poste de nounou à mi-temps. Des mamies pleines d’énergie s’emparent de leur part du gâteau, et remettent au goût du jour le rôle de la nourrisse… version expérimentée.
Chez Family Sphere, organisme qui met en relation parents et nounous, elles sont près de 20%. Ces mamies seniors, qui ont décidé de ne pas s’en tenir à la retraite et de continuer à donner de leur temps, sont en pleine forme. Et elles sont de plus nombreuses à ringardiser l’idée qu’une nounou doit systématiquement être une jeune femme. Pour Cécile Alther, directrice de l’agence Family Sphere de Chatou, en région parisienne, c’est une évidence : « Dans l’état d’esprit des mamans, une nounou, c’est quasi automatiquement une étudiante. Alors bien sûr, tout dépend des familles : pour trois enfants qui jouent au rugby dans la maison, les parents ne feront pas appel au même type de nounou que s’ils ont une petite fille fan de coloriage ! » Et en effet, les attentes ne sont pas les mêmes. « Certaines familles recherchent impérativement une jeune femme pour s’occuper de leurs enfants : ils ont envie d’une grande sœur pour leurs enfants », explique Cécile. « Mais celles qui font appel à une nounou senior se rendent vite compte que c’est une assurance de confiance et de communication qu’elles n’auraient pas trouvé chez une jeune femme. On sait que nos nounous seniors sont beaucoup plus ponctuelles, beaucoup plus conscientes de l’engagement qu’elles ont passé avec les familles. Pour les parents, c’est très rassurant. Elles ont une expérience qui leur permet de prendre plus de recul, et ainsi d’être force de conseils. Elles proposent une analyse autre, dont les parents sont très friands. » En somme, avec une étudiante, les parents sont plus là pour donner des directives. Là, c’est un échange à double sens. En tous cas, les parents semblent conquis. « Quand les parents ont confié leurs enfants à des mamies nounous, ils n’ont plus aucune envie de changer ! »
« Je fais le lien à ma façon entre une mère et son enfant »
Brigitte, 55 ans, Mamie-Nounou
Brigitte travaille avec la même famille depuis trois ans. L’un des avantages de confier la garde de ses enfants à une « mamie nounou » : Brigitte peut s’engager sur le long terme, ce qui est aussi rassurant pour les parents que pour la petite fille, avec qui elle a tissé des liens uniques.
« Ayant toujours travaillé dans un bureau, à 52 ans j’ai eu besoin de changement. Besoin de faire quelque chose d’humain, je me sentir utile non pas devant un ordinateur mais face à des individus réels. Cette garde d’enfant est pour moi un vrai équilibre. Je fais vraiment partie de la famille ! Je m’occupe de cette petite fille depuis qu’elle a cinq ans. Maman de deux grands enfants, je pense que mon expérience est un vrai atout pour m’occuper d’enfants. Quand on fait de la garde d’enfant à mon âge, on sait ce que c’est que d’avoir un vrai engagement auprès d’un enfant, mais on n’a pas la pression qu’on peut ressentir avec ses propres enfants. C’est que du positif ! De ma position, je fais le lien à ma façon entre cette mère et son enfant : la maman a un métier très prenant, ce qui ne l’empêche pas d’être très concernée, très exigeante avec sa fille. Je suis là pour apporter un peu de douceur auprès de la petite fille, et rassurer une maman très inquiète. »
« J’ai l’impression d’avoir une relation de grand-mère à petits-enfants »
Françoise, 64 ans, Mamie-Nounou
Françoise s’occupe de deux petits garçons de sept et cinq ans depuis quelques mois. Si à la retraite elle s’est reconvertie nounou avant tout pour y trouver un revenu d’appoint, ce rôle de « mamie nounou » est vite devenu une richesse dont elle ne pourrait aujourd’hui plus se passer.
« J’ai été enseignante, c’est donc tout naturellement que j’ai voulu proposer mes services pour du soutien scolaire, une fois à la retraite. Compte tenu de mon âge, je n’avais même pas envisagé la garde d’enfant ! Family Sphère m’a proposé d’être nounou pour une famille, et je ne changerais pour rien au monde ! Tous les jours, je vais les chercher à l’école, et je m’occupe d’eux jusqu’au retour de leur maman, aux alentours de 20h. Je m’entends très bien avec les parents : nous sommes dans la même optique éducative, c’est très important. Je n’ai pas d’enfant, mais j’ai deux petits neveux dont je m’occupe souvent, et j’ai toujours été attachée à la cause des enfants : j’ai parrainé pendant plusieurs années une petite fille qui est aujourd’hui devenue une jeune femme. J’ai toujours eu un lien avec l’enfance, et j’y tiens beaucoup. Je pense que mon rôle est particulier du fait de mon âge. Je n’ai pas la même relation avec les deux enfants dont je m’occupe que pourrait l’avoir une jeune fille. Je pense aussi que leurs parents savent que j’ai une certaine expérience, ça les sécurise. J’ai vraiment l’impression d’avoir une relation de grand-mère à petits-enfants. C’est pour moi une ouverture sur l’enfance, et j’en tire beaucoup de richesse. »
Qu’en pensent les parents ?
Mme Kora, maman des deux petits garçons dont s’occupe Françoise
Habituée des nounous étudiantes qui ne sont que de passage dans sa famille, Mme Kora s’est retrouvée face à Françoise, une mamie d’un autre genre qui a complètement changé la donne.
« Au début, je dois admettre que j’étais septique. On a deux garçons : je me suis demandée si elle saurait être suffisamment dynamique, si elle pourrait s’imposer auprès d’eux. J’avais des doutes, mais ça a fonctionné tout de suite. Avec Françoise, on est beaucoup plus dans l’échange qu’avec une jeune femme. Elle participe réellement à leur éducation, sait faire passer des messages, des valeurs. Par exemple, pour les devoirs, elle a énormément de patience et de pédagogie. Elle sait s’adapter, et s’investit beaucoup plus. Elle prend le temps… C’est quelque chose de précieux.
Avant Françoise, mes fils étaient gardés par des nounous étudiantes, qui avaient la fâcheuse habitude de partir du jour au lendemain. Les études, le travail… C’est normal, leur âge veut ça. Mais ils en ont connu quatre en une année scolaire ! Du coup, quand Françoise est arrivée, ils avaient peur qu’elle ne revienne plus. Ils ont tout de suite été conquis ! On sait qu’elle s’investit dans la durée, c’est un confort supplémentaire et une source d’équilibre et de stabilité pour les enfants. Quand on confie ses enfants à une jeune femme, j’ai le sentiment que c’est plutôt : « C’est mon devoir, donc je le fais. »
Et puis, ce n’est pas une nounou comme les autres. Elle n’a pas besoin de punitions pour s’imposer. Elle est plus maternelle qu’une jeune femme, elle les câline tout en sachant faire preuve d’autorité…
Pour nous, c’est aussi plus rassurant de l’avoir à nos côtés : Elle n’est pas dans l’attente d’un travail, d’une mutation. Ce qu’elle fait avec nous, c’est ce qu’elle cherche. Chacun y trouve son compte. En tous cas, les enfants tiennent beaucoup à elle. Ils essayent de ne pas trop la faire courir ! La preuve qu’à leur échelle, ils prennent soin d’elle. »
