Ce qu’il faut savoir sur les enfants précoces

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Si chez l’enfant précoce certains signes ne trompent pas, d’autres, plus difficiles à repérer, peuvent le mener à sa perte. Voici quelques éléments pour mieux comprendre les enfants précoces, éviter un diagnostic tardif, et contribuer au meilleur accompagnement de ses enfants qui, le plus souvent, vivent mal avec leurs trop grandes capacités…En Janvier 2009 se tenait à l’Hôtel de Ville de Paris un séminaire sur les EIP, les Enfants Intellectuellement Précoces, organisé par l‘AFEP, Association Française pour les Enfants Précoces, présidée par Mme Vlinka Antelme. L’occasion de découvrir tous les aspects de cette « particularité »  -non qualifiée de « maladie » comme tenait à le rappeler Mme Antelme.

Il semblerait qu’il y ait 400 000 élèves précoces en France, soit un à deux par classe, mais peu sont repérés. Lorsque l’on sait la souffrance que peuvent subir ces enfants, et l’échec scolaire (beaucoup n’ont pas leur baccalauréat et feront des études sans rapport avec leurs capacités exceptionnelles) qui peut en résulter, connaître leurs spécificités et s’informer afin de pouvoir les accompagner semble donc inévitable.

La précocité chez un enfant, c’est quoi exactement ?

Franck Zenasni,  psychologue chercheur à l’université Descartes, distingue « enfant précoce » et « enfant à haut potentiel », rappelant au passage qu’il existe une différence entre ce qu’un enfant est capable de faire, et ce qu’il fait réellement. Il explique que la psychologie cognitive (soit l’étude du fonctionnement) de ces enfants mène au constat suivant : une capacité à retenir beaucoup d’informations, de retenir longtemps l’information, et de sélectionner l’info utile.

C’est le duo « mémoire d’éléphant » et « œil de lynx » qui caractérise un enfant précoce. Pour les rares cas d’enfants à « très haut potentiel », la différence se fait au niveau de la mémoire à long terme : ils retiennent encore plus d’informations, encore plus longtemps. Le processus de mémorisation peut être schématisé de la façon suivante :
6332Les enfants à haut potentiel bénéficient de d’avantage de fluidité dans la sélection d’information. Par ailleurs, un lien volume du cerveau-quotient intellectuel ayant été établi, on a généralement constaté chez ces enfants un cerveau plus grand que la normale.  Aussi, les enfants précoces ont un plus grand nombre de connexions neuronales, ils profitent donc d’une plus grande rapidité dans la transmission synaptique.

Enfin, des études ont prouvé qu’il existe une asymétrie fonctionnelle entre les deux hémisphères du cerveau : les enfants précoces, souvent gauchers, utilisent plus leur hémisphère droit.

Comment repérer l’enfant précoce ?

« Les élèves précoces sont des élèves déroutants, parfois en sous-réalisation, parfois en sur-réalisation, très agités, trop différents, des ‘je sais tout’, mais surtout des élèves en souffrance… ». Voila l’exposé de Mme Frédérique Trasancos, enseignante. Selon cette formatrice en pédagogie pour EIP, un élève en souffrance développe forcément des maladies… Comme l‘hyperactivité par exemple.

Il est donc essentiel de connaître les signaux de la précocité intellectuelle et de savoir la gérer car « un enfant précoce trop stigmatisé, c’est dangereux, et un enfant pas du tout repéré l’est tout autant ».  La pensée d’Anne-Marie François, enseignante en classe EIP et également formatrice en pédagogie pour EIP, se veut plus positive : « un enfant précoce peut être un élève heureux, ou peut le redevenir ».  Mais, si  30% des EIP sont en échec scolaire à l’issue du collège, tout le monde est d’accord sur un point : il suffit d’un mot, d’un regard -celui des parents, mais aussi des enseignants- qui change et le parcours scolaire peut redevenir harmonieux.

Les enfants précoces ont des particularités bien remarquables : ils ont du mal à écouter l’autre (puisqu’eux même ont beaucoup de choses à dire), ils sont fragiles en terme de confiance en soi, préfèrent rêvasser dans leurs idées intellectuelles, sont souvent mis à mal par les autres (têtes de turcs…), et la ténacité n’est pas leur fort : malgré leurs excellentes idées, il leur est difficile de les réaliser. Les dyslexiques, dysgraphiques et hyperactifs sont à surveiller. Franck Zenasni rappelle que nombre d’entre eux sont gauchers, myopes, avec une grande propension aux allergies. Et Frédérique Trasancos explique que beaucoup ne savent expliquer comment ils raisonnent, si on leur demande en classe par exemple.

D’autre part, le trop grand écart entre ce qui se passe dans leur tête et la réactivité de leur corps (ce qui explique pourquoi les garçons intellectuellement précoces écrivent plus mal que les autres) les met en grande difficulté dans leur relation au corps. Ces éléments peuvent donc nous aider à détecter un enfant précoce.

J’ai un enfant précoce : je fais quoi ?

Frédérique Trasancos fait appel à son imagination chaque jour en classe. Elle explique les tours de passe-passe qu’elle utilise afin que les enfants précoces étudient comme les autres. En leur donnant des énigmes, pour la simple mémorisation des tables de multiplications par exemple.

Selon elle, les enfants précoces ne peuvent apprendre tant qu’ils ne savent pas pourquoi. Ils ont des difficultés dans l’acceptation des règles, et cela peut prendre des semaines avant qu’ils assimilent un procédé. Attention donc à ne pas aller trop vite en besogne, ils ne peuvent acquérir une exigence en une semaine.

Par ailleurs, leur statut d’enfants précoces déséquilibre les rapports avec les parents : une égalité parent-enfant se crée, et l’enfant, vu son intelligence, finit par maîtriser ses parents.  Il faut tenir compte de cette inversion, car lorsque l’enfant part à l’école, il est alors soudainement confronté à la rigueur d’un professeur, ce qu’il ne comprend pas forcément.

En se mettant à la hauteur du professeur, son comportement  pourrait être perçu comme de l’insolence, alors que ce n’était pas voulu… Anne-Marie François a quant &agr
ave; elle trouvé d’autres solutions : plus de possibilités en classe (plus de matières par exemple), pour les professeurs, et plus d’activités (comme la musique) pour les parents. 

Notons également que la curiosité, le goût du jeu, la sensibilité ou encore l’humour sont des moyens efficaces, tant pour les parents que pour les enseignants, de créer un vrai dialogue avec l’enfant précoce. Florence Crénéguy, une autre enseignante en classe EIP, a analysé tous les comportements de ces enfants intellectuellement précoces, de la 6ème à la 3ème. Le collège, surtout pour ceux qui n’ont pas été détectés jusqu’alors, est généralement le moment où surviennent les obstacles. 

En 6ème, il ne faudra pas hésiter à mettre l’enfant devant des inconnues et des difficultés, la 5ème est bénéfique pour ses sorties et voyages, mais un saut de classe, bien préparé et bien organisé est aussi envisageable. En 4ème, la crise d’adolescence s’accentue, et le problème d’intégration, fréquent chez les enfants précoces, s’intensifie. La rigueur qu’exige la 4ème, en prise de notes et autonomie pose de vrais problèmes à ces enfants. 

Au lycée, le coté autonome peut justement autant les servir tout comme il peut les jeter dans un gouffre. Souvent, c’est soit une révélation, soit l’effondrement.  Les études sont habituellement un problème car les enfants précoces veulent rapidement quitter les chaises du lycée, puis les bancs de la fac, pour rapidement être dans le concret. Mais plus un EIP a été pris en compte tôt, plus il a de chances de réussir ses études. Dernier conseil : l’écoute est très importante, que ce soit avec l’enfant, mais aussi entre parents. Finie l’époque de l’enfant précoce qui représente un tabou, il faut oser en parler, et écouter.
L’intelligence est un atout, pas un handicap…

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